La caractérisation de l’altération des facultés

La caractérisation de l’altération des facultés

Publié le : 14/04/2025 14 avril avr. 04 2025

L’article 425 du code civil dispose « Toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté peut bénéficier d'une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre. »

Une altération des facultés mentales suffit à justifier une protection, à condition de démontrer qu'elle empêche la personne de gérer seule ses intérêts et qu'elle nécessite une assistance ou une représentation constante.

En revanche, une altération des facultés physiques n'impacte pas nécessairement l'expression de la volonté : des conditions telles que la cécité, la surdité ou la paraplégie ne nuisent pas, en soi, à la capacité décisionnelle. La loi impose donc une condition supplémentaire : cette altération doit entraver l'expression de la volonté.

Ces conditions sont cumulatives de sorte que la seule caractérisation de l’altération des facultés ne suffit pas pour placer une personne sous une mesure de protection (Cass, 1re civ., 21 nov. 2018, n°17-22.777).

Le défi du juge est grand, et une analyse de chaque situation est indispensable.

Ainsi, le handicap physique, tel que la cécité totale, ne justifie pas, à lui seul, l’ouverture d’une mesure de protection (Cass, 1re civ., 9 mars 1994, n°92-12.232 ; Cass, 1re civ., 27 mars 2024, n°22-13.325). De même, la simple vulnérabilité d'un adulte, même sous influence (Cass, 1re civ., 12 oct. 2022, n°21-12.268 ; Cass, 1re civ., 16 juin 2011, n°10-21.036), ou la dépendance à un proche (Cass, 1re civ., 13 fév. 2019, n°18-13.386), ne suffit pas à placer l’intéressé sous protection. Pour ajouter encore quelques exemples, un quotient intellectuel inférieur à la moyenne ne constitue pas un motif suffisant pour une protection juridique (Cour d'appel de Poitiers, 12 nov. 2014, n° 14/00054), tout comme l’alcoolisme ancien et sévère (Cass, 1re civ., 14 avril 2010, n°09-13.851).

Cependant, l’altération corporelle peut justifier l'ouverture d'une protection juridique lorsqu’elle empêche l'intéressé de faire des choix lucides et rationnels. La Cour de cassation a notamment pu rappeler la possibilité d'instaurer une mesure d'assistance, même si les capacités mentales de la personne ne sont pas affectées, lorsque la dégradation des facultés corporelles impacte sa capacité à exprimer sa volonté. Toutefois, il est nécessaire que le juge établisse clairement cette incidence (Cass, 1re civ., 30 sept. 2009, n° 09-10.127).

Il est donc essentiel que le juge, lors de l'ouverture de la mesure de protection juridique, vérifie que cette altération place la personne dans l'incapacité de gérer seule ses intérêts.

Le certificat médical circonstancié, rédigé par un médecin inscrit sur la liste du Procureur, aiguillera le Juge sur les capacités de l’intéressé, mais l'ouverture de la mesure ne pourra se fonder sur ce seul constat médical.

Le juge est toujours tenu par les principes fondamentaux de la matière que sont la nécessité, la proportionnalité et la subsidiarité de la mesure.

Article rédigé par ma consœur Alexa BERNABE, collaboratrice avec laquelle j'ai le plaisir de travailler depuis mars 2022.

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